Kiliba / Vugizo : un Poste Frontalier stratégique en quête de modernisation
Kiliba - Vugizo – Situé entre la province du Sud-Kivu (RDC) et la province de Bujumbura (Burundi), séparé par la rivière Ruzizi, à plus de 16 km de la ville d’Uvira et à plus de 105 km de la ville de Bukavu sur la RN5, le poste frontalier de Kiliba/Vugizo est une artère vitale du commerce transfrontalier dans la région des Grands Lacs. Chaque jour, des centaines de petits commerçants transfrontaliers (PCT), en majorité des femmes, y transitent avec des produits agricoles, vivriers et manufacturés. Pourtant, malgré son rôle stratégique, ce poste frontalier reste marqué par des insuffisances Infrastructurelles, structurelles et organisationnelles qui freinent le dynamisme économique local.
Le constat dressé lors de la première réunion du Comité Mixte Frontalier (CMF), en septembre 2025 à Bujumbura, est sans appel. Les routes d’accès sont défoncées et souvent inondées, les infrastructures de base inexistantes, l’électricité et l’eau potable absentes. Les usagers, privés de latrines et d’espaces d’attente, subissent des fouilles en plein air qui portent atteinte à leur dignité, en particulier celle des femmes. Les services publics essentiels – normalisation, contrôle phytosanitaire, vétérinaire ou sanitaire – brillent par leur absence, tandis que les flux migratoires restent gérés de manière archaïque. À ces carences matérielles s’ajoutent la corruption, la multiplicité des postes de contrôle et des frais illégaux qui étranglent les petits commerçants. Enfin, le manque de personnel féminin parmi les agents frontaliers expose encore davantage les commerçantes à des abus et à des fouilles intrusives.
Et pourtant, malgré ces entraves, Kiliba/Vugizo demeure un axe vital. C’est par cette frontière que circulent haricots, manioc, maïs, légumes, fruits et volailles destinés à approvisionner les marchés de Bujumbura, d’Uvira et de Bukavu... C’est grâce à ce commerce que des milliers de familles survivent, que des femmes, souvent chefs de ménages, scolarisent leurs enfants et assurent la subsistance quotidienne. C’est aussi un point de contact entre deux nations qui, par l’accord bilatéral de 2022, ont choisi de fluidifier leurs échanges pour bâtir une prospérité partagée. Plus encore, un commerce transfrontalier mieux organisé est un facteur de stabilité et de paix dans une région où les tensions restent vives.
Le CMF de Kiliba/Vugizo, opérationnalisé en septembre 2025, a déjà établi une feuille de route claire : réhabilitation des routes, construction d’infrastructures modernes, mise en place de services publics essentiels, lutte contre la corruption et promotion de l’égalité de genre. Mais ces résolutions resteront lettre morte sans un financement conséquent et rapide.
« Nous appelons le Gouvernement congolais et la Banque mondiale, partenaire historique du PFCIGL, à accroître son appui financier pour accélérer les travaux et répondre aux urgences humanitaires et économiques de ce poste frontalier », plaide Sibatu Muvole, Présidente des Associations des Commerçants Transfrontaliers (ACT) de Kiliba. Et d’ajouter avec force : « Investir aujourd’hui dans ce poste frontalier, c’est investir dans la dignité, la prospérité et la paix de toute une région. Kiliba/Vugizo ne peut plus attendre. Chaque jour sans action est un jour de trop pour des milliers de commerçants contraints de travailler dans l’informalité, l’insécurité et la précarité. »
Kiliba/Vugizo est un maillon essentiel mais fragile du commerce entre la RDC et le Burundi. Sa modernisation n’est pas seulement une nécessité économique : c’est une urgence sociale et une obligation morale. Car à travers ce poste, ce sont les conditions de vie de toute une communauté qui se jouent, ainsi que la paix et la stabilité dans la région des Grands Lacs.
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